samedi 7 août 2010

Titre à venir (partie 2)



Arrive alors F`` la chanteuse mezzo soprano. Très vite, avec U**, elle entre en studio. Petit échauffement. Petits accordements. Et ça y est le duo commence. D’abord une simple phrase qui sera répétée à plusieurs reprises. Finalement assez peu. F`` sait ce qu’U** veut : elle a répété chez elle dans ce sens. Trois prises sont faites. Elles nous rejoignent dans la salle de régie. Ecoute attentive. Musique sublime. Il faut reprendre un peu, le « L » n’est pas complètement satisfaisant et le volume un peu trop fort : les sons sont parasités. Retour en studio. De nouvelles prises. Avant même l’écoute, elles savent qu’elles ont ce qu’elles voulaient. Dans le même temps, P^^ et A'' se sont regardés. Ils sont enthousiastes devant cette prise. Retour rapide en régie. Ecoute. De nouveau dans la salle des pianos. « Dann kommt der Schwierige » (Et puis arrive le plus dur). Telle une espionne, je surprends leurs confidences de travail. De nouveau, le piano sonne. U** donne les premiers accords, et s’élève la voix de F``, précise dessinant sur le goniomètre des traits et des ronds parfaits. « Beauty is a secret trust » résonne baroquement réverbérant la beauté de l’âme du lieu. U** confie sa musique aux micros, mais aussi à ses compagnons. Léger moment de doute. Avez-vous bien pris ceci ? Oui, venez écouter. C’est vraiment beau. Ecoute attentive encore une fois. U** debout, la tête penchée en avant, concentrée. F`` s’est assise, ferme les yeux pour mieux entendre. Elles ne sont pas complètement satisfaites. Mais peut-être peut-on de nouveau entendre ? F`` n’est définitivement pas satisfaite. Il faut recommencer. Le travail de studio est un travail de répétitions jusqu’à saisir l’expression parfaite, la bonne prononciation, le bon accord entre les deux instruments, voix et piano. Travail pas à pas, travail de fourmi qui fait alterner jeu et écoute. Se figurer comment chaque morceaux, esquisse, se mettant bout à bout formera une œuvre complète. Enfin, arrive le moment où chacun est d’accord. Sublime.
Le départ de F`` permet la pause déjeuner. Pendant ce temps, je pars explorer les environs. Un café a été ouvert dans un bâtiment voisin. Il semble complètement anachronique, presque uchronique, dans un hors-temps. La décoration ressemble à celle de l’Allemagne de l’Est des années soixante, mais se superposent des éléments absolument contemporains : les prix en euros, les publicités pour des cafés italiens, la radio qui traite de sujets politiques européens, une boule à facettes. Ce lieu transporte dans une époque presque fictive.
Retour au studio. Fin de la pause déjeuner. L’après-midi est consacré à des raccords. Nous écoutons les enregistrements des derniers jours, moi à travers le casque. U** n’est pas toujours satisfaite. Je le devine plus que je ne l’entends puisque j’écoute encore la musique. Je regarde leurs corps en mouvement, en position d’écoute, puis leurs commentaires. Cela ressemble presque à un film muet pour lequel le pianiste et le batteur joueraient à contre-temps du film. Mais comment se repérer dans les différentes prises de son ? P^^ fait surgir sur l’ordinateur le compteur. Le temps s’est accumulé par tranche. Déjà 681 minutes ont été prises, soient près de 28 heures de travail. Pour retrouver quelques secondes insatisfaisantes, il faut se servir de notes prises les jours derniers, puis naviguer dans ces tranches de temps figées maintenant. Puis de nouvelles secondes, puis de nouvelles minutes se rajouterons à cette bande sonore dont des passages sont dupliqués. Comme si on faisait un copier-coller du temps qui se superposeraient à de nouvelles expériences.
Et toujours lors de l’écoute le fil vert se tend et se détend au gré de sons chiffonnés, ronds, triangulaires ou étirés. Et toujours les aiguilles de l’horloge avancent, me rapprochant de ce moment où je devrai quitter le studio. Je n’étais venue que pour faire la petite souris, regarder la création d’un album avec la confrontation de différents mondes musicaux qui parviennent, dans celui d’U** à communiquer. Elle se remet au piano quand je quitte le studio.




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2 commentaires:

  1. Coucou Céline !
    J'ai lu ces deux textes, c'est intéressant...
    Je ne retrouve pas ton style mais j'aime bien...
    Bisou
    Laurent

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  2. Merci !
    Ce texte est plutôt vieux maintenant, ce qui explique peut-être la différence de styles. Merci de lire aussi régulièrement ce blog !

    Bises,

    Céline

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